J’aurais aimé me faire tirer le portrait par Andy Wharol, pour le fun. Mais ce que j’aurais vraiment aimé, c’est passer une soirée, jusqu’à l’aube, à discuter avec Robert Mapplethorpe. Si il y a quelque chose qui m’a un jour donné envie de prendre un appareil photo et de jouer avec la lumière, ce sont ses images. Une grande exposition se tient pour le moment et jusqu’au 13 juillet au Grand Palais à Paris. Alors, j’y cours !
Qu’est-ce qu’on y verra ?
Plus de 250 oeuvres de l’artiste sont réunies et couvrent toute sa carrière de photographe, des polaroids au début des années 70 aux portraits de la fin des années 1980, en passant par les nus sculpturaux, les natures mortes, le sadomasochisme. L’exposition s’attache à révéler toute les facettes de son oeuvre au-delà des clichés dans lesquels elle a longtemps été enfermée. On verra par exemple un focus autour des deux muses de Mapplethorpe, Patti Smith et Lisa Lyon qui permet d’aborder le thème de la femme et de la féminité, aspect moins connu de l’oeuvre du photographe. Cette exposition est aussi un témoignage sur le New York artistique des années 70/80. Dans son entretien avec Janet Kardon en 1987, Mapplethorpe explique que la photographie dans les années 70 était « le médium parfait » pour « une époque où tout allait vite ». Mappelthorpe ne voulait pas être un photographe, en un sens, c’est la photographie qui l’a choisi. Plus loin dans le même entretien, il confirme : « si j’étais né il y a cent ou deux cent ans, j’aurais sans doute été sculpteur, mais la photographie est une façon rapide de voir et de sculpter. Lisa Lyon me rappelle les modèles de Michel-Ange, qui a sculpté des femmes musclées. »
Et c’est vrai, Mappelthorpe se sert de la lumière pour sculpter ses portraits, ses corps, ses fleurs, ses sexes qu’il juxtapose lors de ses expositions, de façon à ce qu’on puisse voir qu’il s’agit de la même chose. D’abord un sculpteur dans l’âme et dans l’imagination, c’est un plasticien habité par la question du corps et de sa sexualité et obsédé par la recherche d’une forme parfaite. Mapplethorpe, avant d’être photographe, est artiste. Ses images viennent d’une culture picturale où l’on retrouve Titien, David, Dali, et même les grands de la Renaissance italienne, Michel-Ange, Pierro della Francesca, Le Bernin…
Que voir ou lire avant d’y aller.
Pour apprécier l’art de Mapplethorpe, il faut le replacer dans le contexte socioculturel du New York arty des années 70 et 80 d’une part et de la culture de l’underground gay dans ce même espace-temps. Pour mesurer l’explosion libertaire de cette époque, il faut visionner « Flesh », le film de Wharol avec le sex-symbol du cinéma underground : Joe Dalessandro. Le film narre 24 heures de la vie d’un jeune prostitué new-yorkais.
« Midnight Cowboy », véritable chef d’oeuvre aux yeux de Mappelthorpe.
Il faut lire « The Beautiful Room is Empty » (en français « La Tendresse sur la peau » d’Edmund White qui raconte l’itinéraire d’un jeune gay dans les années d’émeutes et de manifestations, mais aussi d’émancipation extrême.
« Dancer from the Dance » de Andrew Holleran datant de 1978 et qui vous transportera dans les explorations sexuelles du Fire Island des années 70.
« J’essaie d’enregistrer le moment dans lequel je vis, qui s’avère être à New York. J’essaie de capter cette folie et d’y mettre un peu d’ordre » Robert Mapplethorpe*
*Sarah Kent, « Mapplethorpe », Time Out, Londres
Robert Mapplethorpe, jusqu’au 13 juillet 2014
Grand Palais, Galerie sud-est,
entrée avenue Winston Churchill – Paris
Renseignements et réservations : www.grandpalais.fr
Si ça vous a plu… partagez, commentez, faites tourner !